@book {407, title = {Les Personnages}, year = {2004}, publisher = {Gallimard}, organization = {Gallimard}, edition = {coll. L{\textquoteright}un et l{\textquoteright}autre}, address = {Paris}, abstract = {

R{\'e}sum{\'e} descriptif:

Dans cet essai d\’une centaine de pages, la romanci{\`e}re Sylvie Germain d{\'e}crit le processus au cours duquel un personnage commence {\`a} prendre forme dans l\’imaginaire d\’un auteur, s\’offrant d{\`e}s lors {\`a} celui-ci comme une chance d\’explorer, au moyen de l\’{\'e}criture, la vuln{\'e}rabilit{\'e} de l\’existence humaine.\ 
La premi{\`e}re et la plus importante partie de l\’essai, \« D{\'e}ambulations \», retrace ce moment d{\'e}terminant o{\`u} le personnage se signale, le plus souvent sous forme d\’image obs{\'e}dante, {\`a} la conscience de son \« h{\^o}te \». {\`A} peine n{\'e} cependant, le personnage \« souhaite na{\^\i}tre de nouveau, autrement \» (p. 15). Le travail de l\’auteur consiste donc, par la suite, {\`a} r{\'e}pondre {\`a} cet appel, {\`a} se mettre {\`a} l\’{\'e}coute de cette pr{\'e}sence encore informul{\'e}e, mais dou{\'e}e d{\'e}j{\`a} \« d\’une {\'e}trange autonomie \» (p. 49). {\'E}coute qui ne peut s\’accomplir, selon Germain, qu\’en {\'e}crivant, qu\’en faisant don au personnage d\’un corps textuel. Processus d\’incarnation, donc, qui permet {\`a} l\’essayiste de mettre en rapport le corps marqu{\'e}, ouvr{\'e} des soci{\'e}t{\'e}s primitives et le corps cach{\'e}, m{\'e}diatis{\'e} des soci{\'e}t{\'e}s {\`a} {\'e}criture. Le motif du corps, devenu objet de pr{\'e}dilection dans l\’ensemble de la cr{\'e}ation artistique contemporaine, induit {\'e}galement, dans cet ouvrage, la question de l\’auto-fiction, de la relation qu\’entretient l\’auteur avec son propre corps devenu lui-m{\^e}me territoire {\`a} explorer, {\`a} interroger.
\« Esquisses en marge \», la deuxi{\`e}me et derni{\`e}re partie de l\’essai, se compose quant {\`a} elle de deux fictions qui mettent chacune en sc{\`e}ne l\’{\'e}criture d\’un personnage : un personnage qui se donne {\`a} {\'e}prouver, dans le texte, par son absence. Sylvie Germain rappelle, {\`a} m{\^e}me les lignes et les figures d\’un r{\'e}cit, que l\’auteur n\’est jamais \« \“le ma{\^\i}tre dans la maison\” de son imaginaire \» (p. 49), car il se voit toujours soumis au doute et {\`a} l\’incertitude que fait na{\^\i}tre en lui ce corps {\'e}nigmatique \« investi de tous les possibles \» (p. 86).
R{\'e}sum{\'e} interpr{\'e}tatif:
Dans cet essai, qui tient {\`a} la fois de la po{\'e}tique et de la philosophie, Sylvie Germain r{\'e}fl{\'e}chit {\`a} plusieurs concepts et {\`a} plusieurs motifs fondamentaux du travail de la cr{\'e}ation, ceux notamment du corps, de la m{\'e}moire, de l\’{\'e}coute, de la lecture, du doute, de la po{\'e}sie et de l\’auto-fiction. Au moyen d\’une langue attentive et patiente, l\’essayiste retrace le processus au long duquel le personnage acquiert, gr{\^a}ce {\`a} l\’{\'e}criture, son autonomie, son propre corps textuel.
Avant m{\^e}me que ne s\’enclenche le travail d\’{\'e}criture comme tel, ce processus s\’amorcerait lorsque les personnages, ces \« dormeurs embu{\'e}s de nuit \» (p. 12), apparaissent pour la premi{\`e}re fois au seuil de la conscience. L\’auteur se verrait d{\`e}s lors intim{\'e} de traduire ces pr{\'e}sences, dont il ignore encore le contenu, mais qui tressaillent d{\'e}j{\`a} \« d\’un d{\'e}sir de jour, de chants audibles, de langage intelligible \» (p. 12).\ 
Traduction paradoxale qui ne peut s\’accomplir, selon Germain, que si l\’auteur, devant la multitude de choix auxquels il se trouve confront{\'e}, consent d\’abord et avant tout {\`a} l\’{\'e}coute de cette promesse qui se r{\'e}v{\`e}le encore \« tr{\`e}s improbable quant {\`a} sa r{\'e}alisation \» (p. 25). Tel serait donc le d{\'e}fi : celui d\’une {\'e}coute qui se d{\'e}finit, dans cet essai, non seulement comme une aptitude {\`a} recevoir, mais aussi comme une fa{\c c}on de collaborer, de participer {\`a} la cr{\'e}ation du personnage. En se soumettant enti{\`e}rement {\`a} l\’objet de son {\'e}criture, l\’auteur d{\'e}couvre, par le fait m{\^e}me, \« l\’{\'e}tendue de sa non-ma{\^\i}trise \» (p. 50). Car son texte s\’{\'e}labore {\`a} partir d\’une faille, d\’un corps obscur {\`a} la fois intime et anonyme qui s\’offre aussi {\`a} l\’auteur comme une chance \« de vivifier sa capacit{\'e} de lecture des autres \» (p. 35).
Ce \« double mouvement d\’{\'e}criture/lecture \» (p. 37) du corps et de sa part d\’ombre n\’est cependant pas le seul apanage du romancier. Sylvie Germain rappelle que dans les soci{\'e}t{\'e}s primitives, le corps tatou{\'e}, scarifi{\'e}, exposait en permanence sa vision du monde et son appartenance {\`a} la communaut{\'e}. Si le discours relatif au corps change de support dans les soci{\'e}t{\'e}s {\`a} {\'e}criture (la peau se trouvant d{\'e}sormais remplac{\'e}e par la feuille), le rapport entre le corps et le texte produit reste n{\'e}anmoins du m{\^e}me ordre : il continue, comme jadis, de c{\'e}l{\'e}brer l\’inconnu qui sommeille en tout individu.
On {\'e}crit donc toujours sur le corps. Mais que se passe-t-il, se demande Germain, lorsque ce corps \– comme on le voit de plus en plus appara{\^\i}tre dans la litt{\'e}rature contemporaine (en l\’occurrence dans le genre de l\’auto-fiction) \– est celui de l\’auteur lui-m{\^e}me ? Le \« moi-personnage \» ressemble certes au personnage de fiction en ceci qu\’il demande lui aussi {\`a} {\^e}tre entendu, qu\’il \« souffre d\’incompl{\'e}tude en l\’absence d\’un r{\'e}cit qui lui donnera forme, structure, consistance \» (p. 78) ; mais la relation qu\’un auteur entretient avec un personnage d\’auto-fiction n\’est possible, pr{\'e}vient l\’essayiste, qu\’\« {\`a} condition que l\’auteur ne se plante pas devant lui-m{\^e}me comme devant un miroir magnifiant, excitant, mais qu\’il tourne ce miroir de soi vers le monde, pour que le monde s\’y r{\'e}fl{\'e}chisse. \»(p. 80). {\`A} condition, autrement dit, qu\’il se laisse emporter dans l\’{\'e}criture par ce qu\’il ignore encore de lui-m{\^e}me.
Le personnage, peu importe l\’instance qu\’il incarne, aurait donc toujours raison de son auteur, imposant sans rel{\^a}che {\`a} celui-ci l\’humilit{\'e} et la modestie dans son rapport {\`a} l\’{\'e}criture. Cet essai propose, en ce sens, une v{\'e}ritable {\'e}thique de la cr{\'e}ation, qui s\’adresse plus particuli{\`e}rement au romancier, mais au sein de laquelle les po{\`e}tes reconna{\^\i}tront la m{\^e}me exigence envers la langue. Une langue qui, par sa rigueur et sa justesse, permet en fin de compte {\`a} tout {\'e}crivain de donner forme au r{\'e}el, dans ce qu\’il comprend encore de fragile, d\’inapparent et d\’inconnu.\ 

Source : Interligne - UQ{\`A}M (http://www.interligne.uqam.ca/pages/liste_biblio.asp)

}, author = {Sylvie Germain} }