Écrire

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TitreÉcrire
Type de publicationLivre
Année de publication1993
Auteur·e·sMarguerite Duras
Nombre de pages146
ÉditeurGallimard
VilleParis
Résumé

Résumé descriptif:

Dédié à la mémoire de W. J. Cliffe, un «jeune aviateur anglais tué le dernier jour de la guerre» (p. 70), Écrire se veut non seulement une réponse à l’absurdité de cette mort, qui est en fait le prétexte et la raison d’être de ce livre, mais se donne également à lire comme une longue réflexion sur le sens de l’écriture dans ses rapports à la solitude et au corps, toujours proche de la folie. Aussi, les cinq textes qui composent le livre de Marguerite Duras, issus de dialogues, d’entrevues et de scénarios de films, s’attardent à développer une poétique qui repose sur la «sauvagerie» (p. 28) de l’écriture et de sa traversée du corps et du souffle. Cette sauvagerie, «on la reconnaît toujours, c’est celle des forêts, celle ancienne comme le temps. Celle de la peur de tout, distincte et inséparable de la vie» (p. 28-29 ; ce mouvement de l’écriture qui rejoint les peurs inscrites au plus profond de l’être, «la solitude initiale de l’auteur» (p. 31).
 
Dès le premier texte, intitulé «Écrire», Marguerite Duras tente de définir, cette solitude de l’écriture «sans quoi l’écrit ne se produit pas, ou il s’émiette exsangue de chercher quoi écrire encore» (p. 17). En ce sens, les lieux de l’écriture —pour elle la maison de Neauphle-le-Château— révèlent l’écrivain à lui-même, le ramènent à sa solitude, à son désespoir et à la peur de l’obscurité, mais aussi à la liberté et à la vérité de l’écriture. 
 
Dans le second texte, «La mort du jeune aviateur anglais», la mort est «l’écroulement silencieux du monde» (p. 100). Et face à la mort inutile de ce jeune aviateur, la nécessité de l’écriture s’impose : celle qui sauve de l’oubli, celle qui donne à l’histoire une mémoire de l’événement, parce que «[l]a mort de n’importe qui c’est la mort entière. N’importe qui c’est tout le monde» (p. 78).
 
Résumé interprétatif:
 
Dans une écriture proche du corps et du souffle, parfois même du silence, Marguerite Duras observe, dans Écrire, l’existence même de l’être et du monde dans l’écriture, la vie, la mort, la solitude. Aussi, face à l’exigence et à la nécessité de l’écrit, il faut créer «une séparation d’avec les autres gens autour de la personne qui écrit les livres. C’est une solitude. C’est la solitude de l’auteur, celle de l’écrit» (p. 17). En ce sens, le crépuscule et la maison de Neauphle-le-Château sont un moment particulier de la journée et un lieu privilégié pour Duras, dans la mesure où ils livrent —abandonnent en quelque sorte— l’auteure à une écriture «sauvage» (p. 38) où la solitude côtoie la folie et la mort. Mieux, l’obscurité et la solitude de la maison portent en elles-mêmes toutes les angoisses, tous les silences et toutes les peurs de l’auteure, c’est comme «se trouver dans un trou, au fond d’un trou, dans une solitude quasi totale et découvrir que seule l’écriture vous sauvera» (p. 24), que seule l’écriture peut encore parler pour vous. 
 
Plus encore, l’écriture «c’est l’inconnu que l’on porte en soi» (p. 64), c’est ça ou rien : «ça arrive comme le vent, c’est nu, c’est de l’encre, c’est l’écrit, et ça passe comme rien d’autre ne passe dans la vie» (p. 65), c’est toujours plus que ce que l’on croit. C’est l’inconnu, comme lorsqu’il s’agit de décrire la mort du jeune aviateur anglais, parce que la mort d’un enfant de vingt ans c’est la mort tout entière, parce que «c’était tout le monde et c’était aussi lui seul. C’était tout le monde et lui» (p. 76). Elle condense ainsi les morts individuelles et anonymes, (son enfant mort à six mois, son frère Paulo et cet orphelin de vingt ans) en la Mort elle-même, en la mort de chacun des enfants de chacune des guerres passées ou à venir. Face à l’absurdité de la mort d’un enfant, la parole et l’écriture deviennent impossibles.
 
Comme dans un film, Marguerite Duras imagine alors le récit de la mort du jeune aviateur anglais, fait «d’insistances, de retours en arrière, de redéparts» (p. 99). Un film que l’on serait contraint d’abandonner aussitôt qu’on entre dans l’écriture, livré à soi-même, à la sauvagerie et à l’inconnu de l’écriture. Or, c’est précisément cet «abandon» (p. 99) que l’on devrait filmer, selon Duras, comme s’il s’agissait d’une «écriture du non-écrit» (p. 86) où les mots sont sans attaches, quittés avant même d’être écrits. Car «un jour, il n’y aura rien à écrire, rien à lire, il n’y aura plus que l’intraduisible de la vie de ce mort si jeune, jeune à hurler» (p. 100), l’intraduisible de la vie, qui traverse le corps et de la solitude.
 
Chez Duras, solitude et mort sont liées l’une à l’autre, inextricablement, en une sorte de proximité qui relève de la folie, mais également du suicide de l’auteur, toujours à recommencer. Pour elle, «[i]l y a le suicide dans la solitude d’un écrivain. On est seul jusque dans sa propre solitude. Toujours inconcevable. Toujours dangereux» (p. 38). À partir de là, l’écriture est perçue comme un glissement, comme une forme d’abandon. Mais la solitude de l’auteur et la solitude de l’écrit, comme celle de Duras, c’est aussi «celle du monde entier» (p. 38), celle qui a tout envahi, partout présente. Cette solitude, «c’est ce sans quoi on ne fait rien. Ce sans quoi on ne regarde plus rien» (p. 38-39). Pour Marguerite Duras, la solitude n’est pas seulement une posture d’écriture ou un état intérieur, mais davantage une manière de voir le monde et d’appréhender l’écriture.

Source : Interligne - UQÀM (http://www.interligne.uqam.ca/pages/liste_biblio.asp)