Essai sur la fatigue

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TitreEssai sur la fatigue
Type de publicationLivre
Année de publication1991
Auteur·e·sPeter Handke
CollectionArcades
Vol.19
Nombre de pages80
ÉditeurGallimard
VilleParis
ISBN9782070722518
Résumé

Résumé descriptif:

Par un questionnement qui désamorce, non sans une certaine pointe d’ironie ses propres réflexions, Peter Handke entreprend, avec son Essai sur la fatigue, de «raconter les différentes visions du monde des différentes fatigues» (p. 18). Qu’il s’agisse de la fatigue redoutable ou de la «seulfatigue» (p.15), de la fatigue du couple ou de la fatigue commune d’un groupe de personnes, la «fatigue», au sens où l’entend Handke, modifie la perception habituelle que l’on a de la réalité. Ainsi, la fatigue a «ce pouvoir de faire voir» (p. 66), elle est ce prisme par lequel passe le regard de l’écrivain dans une entreprise de mise en forme du monde. En ce sens, si la fatigue peut parfois autant éloigner l’être que le rapprocher des autres et du monde, elle permet également d’accéder à cet au-delà du regard où le monde semble s’organiser et se raconter de lui-même. La «fatigue au regard clair» (p. 57) donne alors sa forme au récit, transforme l’image en sensation. 
 
Pour Peter Handke, des liens peuvent être tissés entre la fatigue et l’écriture parce que la fatigue permet le doute et brise la résistance. Elle conduit à des états poétiques de porosité et de disponibilité et, puisque «de telles fatigues veulent être partagées» (p. 67), de nouveaux types de communication peuvent alors s’établir. Pour l’auteur, «[l]’inspiration de la fatigue dit moins ce qu’il faut faire que ce qu’on peut laisser de côté» (p. 73).
 
Avec cet essai, Handke propose donc de rétablir la fatigue comme une valeur, à la fois d’enseignement et d’accomplissement. Car la fatigue n’est plus perçue ici comme une faute, mais comme un filtre qui permet de voir le monde.
 
Résumé interprétatif:
 
Dans Après-midi d’un écrivain (1988), un personnage d’auteur, en retrait du monde et habité par la fatigue, mettait en relief la solitude et le doute inhérents à l’acte d’écrire. Dans le prolongement de cette réflexion, l’Essai sur la fatigue (1991) de Peter Handke déplace le regard en inscrivant la fatigue dans un rapport de nécessité où elle permet l’écriture. État intérieur, la fatigue apparaît ici comme une forme de présence au monde et le foyer de la sensation. «Grâce à [la] fatigue, le monde était grand et débarrassé de ses noms» (p. 56), écrit Handke. Vue ainsi, comme un mode de compréhension qui intensifie le regard et aiguise la perception, la fatigue transforme les images en sensations, agit et intervient sur le monde. 
 
Présentant les différentes sortes de fatigue, Handke rend compte de quatre types de rapport du «moi-langage» (p. 56) au monde, quatre phases de la fatigue mais aussi de l’écriture. Dans la première, l’être est coupé du monde «avec la force d’une souffrance» (p. 11) et enfermé dans le silence. Puis le moi-langage est assailli par les voix et les bruits du monde, mais reste «toujours aussi muet, tout au plus capable de crier» (p. 56). Avec la troisième phase, une écriture commence à être possible, tout en restant une écriture privée, adressée à quelqu’un de précis : «Involontairement, ça se met à raconter, phrase après phrase» (p. 56). Finalement, dans la «fatigue au regard clair, c’est le monde qui se raconte lui-même, en silence, absolument sans paroles» (p. 57), à l’écrivain. 
 
Autant la fatigue élève, dans les deux premiers types de rapports au monde, des murs infranchissables entre les êtres, autant, par la suite, elle brise les liens qui entravent la communication, anéantit les résistances et les réticences. Ce changement de perspective n’advient pour Handke que dans un rapport très personnel à soi et hors de toute planification, de toute volonté. Presque une grâce, semblerait-il, en ce que la fatigue «ouvre, fait passer [et] ménage un passage pour l’épopée de tous les êtres» (p. 61-62), permettant non seulement un rassemblement, un «remembrement» (p. 54), mais aussi la proximité, l’ouverture. «Et le relatif dans le regard fatigué devient absolu et la partie le tout» (p. 68). La fatigue n’est donc pas seulement une réponse aux besoins de se (re)connaître, elle est ce qui lui donne forme : une vision du monde. 
 
Porté par la fatigue, l’essai de Handke cherche à donner à voir, à en faire sentir «une pure image» (p. 31), une image qui soit exempte d’argumentation et qui devienne sensation. Ce faisant, il remet en question la forme même de l’essai puisqu’il présente non pas une vision mais des images dont le récit constitue la seule théorisation. «Qu’il me suffise d’aller à la suite des images de mon problème [...]. Si je pouvais me souhaiter quelque chose de plus pour la continuation de cet essai sur la fatigue, ce serait plutôt une sensation» (p. 26-27). 
 
Pour Handke, la fatigue construit un peuple, une communauté, et c’est ce caractère unifiant qui clôt son essai, dernière image autant de la fatigue que de l’humanité : «réconciliée en ses ultimes instants dans une fatigue cosmique» (p. 77). Cette vision nostalgique et idéaliste de la
fatigue qui unit et purifie laisse finalement transparaître une désillusion face à la société actuelle et à son refus de la fatigue et du doute, comme si ce refus était en même temps celui d’une proximité, d’une participation à l’épopée silencieuse.

Source : Interligne - UQÀM (http://www.interligne.uqam.ca/pages/liste_biblio.asp)