L'écriture ou la vie

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TitreL'écriture ou la vie
Type de publicationLivre
Année de publication1997
Auteur·e·sJorge Semprun
CollectionFolio
Nombre de pages189
ÉditeurGallimard
VilleParis
Résumé

Résumé descriptif:

L’écriture ou la vie rend compte de la lutte d’un écrivain pour la vie, pour l’écriture ; vie et écriture réunies par l’expérience de la mort qu’elles partagent depuis la libération de Semprun du camp de concentration de Buchenwald, le 11 avril 1945, jusqu’à la publication de L’écriture ou la vie, près d’un demi-siècle plus tard. Le récit de Semprun se situe au-delà de l’autobiographie dans la mesure où, pour l’auteur, la vérité essentielle du témoignage ne peut passer que par l’écriture littéraire, par la fiction, c’est-à-dire par «l’artifice d’un récit maîtrisé» (p. 26). 
 
Mais l’écriture n’exorcise pas la mort, elle renvoie au contraire la mémoire au passé. Aussi, Semprun, ancien étudiant en philosophie du lycée Henri-IV à Paris, poète d’origine espagnole et résistant communiste envoyé en détention, tente, par le biais de ce récit, de faire partager son expérience individuelle de la mort, qui n’a pas tant fait de lui un rescapé qu’un «revenant» (p. 27). Car, une fois libre, Semprun a dû choisir entre l’écriture ou la vie, entre la stratégie de survie qu’offrait l’oubli et le douloureux voyage dans la mémoire qu’exigeait l’écriture. Il optera d’abord pour la vie, une cure de silence, abandonnant un projet d’écriture qui l’aurait replongé dans l’atmosphère des camps. Cela lui a permis de métaboliser l’horreur et d’engager un travail sur la mémoire qui se traduira dans l’œuvre à venir par une structure baroque faite d’ellipses, d’analepses et de prolepses. Dans un tissage de divers réseaux de signifiance, L’écriture ou la vie interroge l’écriture et la vie au seuil de la mort, du désespoir et de l’angoisse.

Résumé interprétatif:

Ce n’est que seize ans après sa libération du camp de concentration de Buchenwald que Jorge Semprun trouvera la force et le courage non seulement de plonger dans sa mémoire et de revivre le passé, mais encore de réaffronter la mort à travers l’écriture. En ce sens, L’écriture ou la vie témoigne de cette distance et de la corrélation entre la volonté de dire la vie et la volonté de taire la mort —que l’on retrouvera d’ailleurs dans les enjeux éthiques et esthétiques de l’œuvre— dont est imprégné celui qui a côtoyé de trop près l’inimaginable. Car, comme l’écrit Semprun, «ce n’était pas la réalité de la mort, soudain rappelée, qui était angoissante. C’était le rêve de la vie, même paisible, même rempli de petits bonheurs. C’était le fait d’être vivant, même en rêve, qui était angoissant» (p. 24). Aussi, pendant seize ans il préféra l’oubli, seule manière selon lui de survivre à l’enfer nazi.
 
Pour Semprun, la difficulté est de parvenir à rendre l’essentiel de l’expérience des camps de concentration sans faire du reportage, d’être entendu sans tomber dans le fait vécu ou le témoignage. Pour répondre à cette difficulté, qui forme en quelque sorte la trame du livre, Semprun articule toute sa réflexion autour de deux approches distinctes : la première, philosophique et la seconde, artistique. D’abord, à la suite de Kant, il réfléchit au concept de Mal radical (das radikal Böse) où, pour reprendre les paroles de Malraux, il faut aller chercher au-delà de l’horreur «la région cruciale de l’âme où le Mal absolu s’oppose à la fraternité» (p. 75). Dans cette entreprise de réflexion sur la condition humaine et sur l’expérience de la mort, l’ancien étudiant de philosophie s’inspire des lectures de plusieurs penseurs et hommes de lettres, tels Husserl, Heiddeger, Hegel, Nietzsche et Goethe.
 
Ensuite, Semprun tente de parvenir «à cette substance, à cette densité transparente que [possèdent] ceux qui sauront faire de leur témoignage un objet artistique, un espace de création» (p. 25-26). Car si, selon lui, l’expérience des camps demeure invivable en elle-même et inénarrable en tant que telle, elle n’est pas pour autant indicible et c’est précisément là que cette expérience, dans l’écriture, pose les questions de la densité, mais aussi de la substance où «[s]eul l’artifice d’un récit maîtrisé parviendra à transmettre partiellement la vérité du témoignage» (p. 26). Une vérité qui, même partielle, passe inévitablement par le travail esthétique, par la création, par la mise en forme du récit, puisque «[l]’autre genre de compréhension, la vérité essentielle de l’expérience, n’est pas transmissible. Ou plutôt, elle ne l’est que par l’écriture littéraire» (p. 167). 
 
Ce choix littéraire amène donc l’auteur à adopter des points de vue qui lui permettent de s’extraire du récit, de se voir à distance : «[i]l me faut donc un “je” de la narration, nourri de mon expérience mais la dépassant, capable d’y insérer de l’imaginaire, de la fiction» (p. 217). Partant de là, Semprun effectue d’incessants allers et retours dans le temps, procédé qui lui permet de recréer le fonctionnement non linéaire de la mémoire, d’effectuer des digressions et de revenir ensuite creuser les événements préalablement esquissés. Parce qu’il croit à la supériorité de l’art et à la possibilité de transcender l’expérience par le truchement des œuvres, Semprun parvient, dans son projet, à mettre en lumière les rapports entre la mémoire, la mort et l’écriture et à créer un véritable objet artistique.

Source : Interligne - UQÀM (http://www.interligne.uqam.ca/pages/liste_biblio.asp)