Le temps et l'autre

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TitreLe temps et l'autre
Type de publicationLivre
Année de publication1983
Auteur·e·sEmmanuel Levinas
CollectionQuadriges
Nombre de pages91
ÉditeurPresses Universitaires de France
VilleParis
Résumé

Résumé descriptif:

Le temps et l’autre réunit quatre conférences prononcées par Emmanuel Levinas au Collège Philosophique de Jean Wahl à Paris, conférences dans lesquelles il élabore certaines notions déjà abordées dans De l’existence à l’existant1, rédigé pour l’essentiel en captivité au stalag.
 
Toute la critique de Levinas consiste à montrer «que le temps n’est pas le fait d’un sujet exposé seul, mais qu’il est la relation même avec autrui» (p. 17). En approfondissant la notion de solitude, l’auteur la propose comme liberté première de l’homme —l’espace où je dis je— découvrant ainsi, en tant qu’existant, sa maîtrise sur l’exister. Cependant, l’homme qui contrôle son exister, son présent, s’enchaîne à lui-même, s’encombrant de son soi. Pour surmonter ce poids, il doit ou bien sortir de lui extatiquement, ou bien s’oublier : c’est là la morale première, celle des «nourritures terrestres» (p. 46). Cela ne le fait pas sortir pour autant de sa solitude, ni à plus forte raison de sa souffrance. Mais précisément en ce qu’elle rapproche de la mort, la souffrance s’ouvre sur l’Autre dans une relation de mystère, dans un avenir insaisissable. Considérant de ce point de vue le rapport de l’étant avec la pure altérité, Levinas pose alors la question fondamentale de ses conférences : «L’étant peut-il entrer en relation avec l’autre sans laisser écraser par l’autre son soi-même ?» (p. 65).
 
Dans la pensée de Levinas, eros et filiation, au même titre que la mort, se caractérisent fondamentalement par l’absence de pouvoir. En dernière analyse, c’est donc notre impuissance à posséder et à comprendre l’autre  dans l’amour notamment  qui «constitue précisément la positivité de la relation ; cette absence de l’autre est précisément sa présence comme autre» (p. 89).
 
1Emmanuel Levinas, De l’existence à l’existant. Paris : Librairie philosophique J.Vrin, seconde édition augmentée, 1981, 174 p.
 
Résumé interprétatif:
 
La thèse centrale des conférences de Levinas réunies dans Le temps et l’autre (1948) développe l’idée que le temps, puisqu’il ne se laisse pas assimiler par l’expérience (l’avenir, par exemple, nous échappe), relève entièrement de l’altérité, comme la mort. Notre rapport au temps ne prend donc pas la forme d’une communion mais d’un face-à-face, comme notre relation à l’autre.
Chez Levinas, la solitude est comprise comme souveraineté au fondement de l’être et de l’identité. Elle apparaît comme un principe d’individuation, une traction de l’existence. On ne peut lui échapper : elle constitue notre maîtrise, notre responsabilité, notre liberté, notre présent. Au départ, l’exister n’existe pas par lui-même, il est comme laissé à l’abandon, n’a pas lieu. Cet exister sans existant, appelé il y a, dans la théorie de Levinas, est «l’endroit où se produira l’hypostase» (p. 28). Et l’hypostase, explique-t-il, consiste en un point de rupture, une déchirure que le présent opère dans l’espace illimité de l’exister. Sur l’il y a, elle est comme un bruissement de silence, une force impersonnelle, anonyme. Se détache donc à ce point un exister irrémédiable, et avec lui un présent qui ne vient de rien. 
 
Mais à partir du moment où l’existant existe se pose inévitablement la question de l’identité du sujet enchaîné, entravé dans sa liberté par sa responsabilité envers lui-même, liant irrémissiblement le moi et le soi. Levinas appréhende en fait le temps comme un au-delà de l’être en relation avec l’altérité dans sa solitude et son unicité. La solitude, c’est précisément la maîtrise de l’être sur l’étant, un mystère qui place le sujet devant l’insaisissable, l’amène aux prises avec lui. Le mystère chez Levinas désigne tout ce qui n’est pas moi-même : l’autre, l’avenir, la mort. «L’avenir, c’est l’autre» (p. 64), et c’est dans le sens de cette échappée qu’il faut comprendre le titre de l’ouvrage : l’autre, irréductiblement et inévitablement, est «ce que moi je ne suis pas» (p. 75). Mais la tension dialectique de cet écart souligne à son tour cet autre enjeu : dans quelle mesure le soi peut-il entrer en relation avec l’autre sans cesser d’être lui-même ?
 
Levinas revient alors à la question de la solitude et souligne que c’est dans la souffrance que s’exprime le plus âprement l’unicité de l’être. Impossible en effet de se soustraire à la souffrance, qui est essentiellement une «impossibilité du néant» (p. 56) assujettie au mystère de la mort. En tant qu’événement qui départit le sujet de tout pouvoir, toute maîtrise sur lui-même, la mort ne s’inscrit donc dans aucun maintenant, elle est insaisissable, et force la passivité du sujet. En cet instant où «nous ne pouvons plus pouvoir» (p. 62), elle arrive, elle est là. Et nous voilà soudain devant l’altérité la plus radicale : la mort sépare l’exister de l’existant, crée bel et bien avec l’autre une relation de mystère.
 
Levinas propose alors, à partir de l’eros, une vision suivant laquelle le moi pourrait, sans se perdre, entrer en relation avec l’autre, apparenté ici au féminin. Dans l’eros, il y a pur contact avec l’altérité, le mystère, sans que le je ne disparaisse. Ce qui rend ici la figure du féminin si significative, c’est qu’elle renvoie à l’impossibilité de posséder l’autre, de le saisir. La problématisation de ce rapport permet ensuite d’introduire le concept de paternité par lequel l’auteur suggère que le soi peut s’absorber dans le toi sans s’annihiler. Autrement dit, le père serait en quelque sorte son fils, sans pour autant s’encombrer de son identité (la matérialité du soi ne serait donc pas sans rémission, la paternité permettant une sorte de retour du moi à soi sans l’ancrage et l’autorité de l’hypostase).
 
Levinas soutiendra pour conclure que la relation à la mort, au féminin, au fils, ne peut être envisagée dans un rapport de pouvoir, car la liberté de l’autre demeure étrangère au sujet. Il ne s’agirait donc pas pour lui de tromper sa solitude dans l’espérance d’une quelconque fusion, mais plutôt d’accepter le principe d’un «face-à-face sans intermédiaire» (p. 89) avec ce qui ne peut que lui échapper.

Source : Interligne - UQÀM (http://www.interligne.uqam.ca/pages/liste_biblio.asp)