Le romancier, lorsqu’il écrit sous la pression intérieure d’un personnage lui réclamant sa part de mots, sa part de vie, s’aventure à fond dans ce double mouvement d’écriture/lecture aussi opposé que complémentaire, et qui le rend aussi passif qu’inventif. C’est pourquoi il ne peut « bien » lire (entendre, comprendre, interpréter) ce que semble vouloir lui dire le personnage qui le taraude qu’en écrivant : c’est le geste d’écrire, fût-ce à tâtons sur une feuille d’une blancheur à première vue stérile, décourageante, voire écœurante, qui dispense progressivement au romancier (mais à un rythme souvent discontinu) un peu de clarté, des brins de sens, lui ouvre des pistes. Le geste d’écrire est toujours geste de délivrance. pp. 40-41 (réédition coll. Folio)